Perversités Franco-européennes
(Ceci n'est pas un article alarmiste sur le déficit, mais une nouvelle façon de le comprendre et d'envisager des solutions!... Désolé pour la longueur, mais j'ai déjà pas mal taillé dedans!)
Mes chers lecteurs,
Le titre de cet article doit s’en doute vous inquiéter, et pourtant il n’est en aucun cas question de s’intéresser à la vie sexuelle des fonctionnaires Bruxellois. En fait, je souhaiterais plutôt, aujourd’hui, éveiller vos petits esprits d’économistes en herbe afin de traiter d’un de mes sujets préférés : la dette et le déficit.
Pour bien comprendre, souvenez-vous bien d’une grande distinction. La dette représente l’ensemble de l’argent que l’Etat doit à ses emprunteurs, alors que le déficit représente simplement son résultat négatif sur une année (un exercice).
Souvenez vous aussi que la France a signé le Pacte de Stabilité et de Croissance (PSC), un traité européen qui lie les pays de la zone euro : ils ne doivent pas présenter de budget avec un déficit supérieur à 3% du PIB, et ne doivent pas avoir une dette supérieure à 60% du PIB.
« Et alors ? On sait déjà que nos finances ne sont pas brillantes ! » me direz-vous.
Certes. Mais ce que je voudrais vous montrer, c’est un effet pervers de ce Pacte… je m’explique en regardant nos politiques budgétaires des dix dernières années. Car c’est évidemment la France qui l’a mis en pratique… (soupir).
De 1998 à 2001, la France et l’Europe ont connu une période de croissance assez soutenue et confortable. Ainsi, les rentrées fiscales de l’Etat ont été importantes, et le déficit commençait à se résorber naturellement (je ne nie cependant pas la qualité exceptionnelle de gestionnaire de L. Jospin, à défaut d’avoir un charisme transcendant). L’Etat, alors, s’est permis des lancements de politiques nouvelles, induisant des dépenses, sans pour autant contribuer à la dette. On pouvait être optimiste : l’Etat présentait des excédents.
Problème : la bulle internet explose en 2002-2003, entraînant l’occident dans un cycle de ralentissement de la croissance. La consommation baisse et l’appareil économique a des ratés : les rentrées fiscales de l’Etat diminuent de manière aussi importante qu’elles avaient grimpé autrefois. L’Etat donc, pour ne pas trop s’éloigner des critères du Pacte, lance une politique de rigueur budgétaire serrée, tout en restant largement déficitaire.
Ce qu’il faut comprendre, c’est que les recettes fiscales de l’Etat, parce qu’elles dépendent énormément de la croissance, de la consommation et de l’emploi, sont extrêmement sensibles à la conjoncture économique. En revanche, les dépenses, elles, sont beaucoup plus rigides : il est en effet difficile d’arrêter l’application d’une politique publique précise, nécessitant des dépenses, « en plein milieu » de sa mise en oeuvre… à moins qu’elle présente des résultats franchement décevants.
Donc les recettes de l’Etat varient beaucoup, alors que les dépenses, elles, non. En général, une dépense engagée doit être menée à son terme, jusqu’à l’achèvement de la politique qu’elle finance.
Le gouvernement, qui se sent à l’aise en temps de croissance, engage donc des dépenses qu’ensuite, si une crise survient, il ne peut plus assumer. C’est débile, non ? Il a l’équivalent d’une politique de relance en temps de croissance, et se serre la ceinture en temps de crise !
C’est là l’absurdité de la chose ! Car il est beaucoup plus simple de réduire le déficit en temps de croissance qu’en temps de crise. En effet, pour réduire la dette, il suffit que le déficit soit inférieur à la croissance économique.* Il suffirait donc de deux voire trois années de croissance convenable pour réduire considérablement la dette. Mieux : si, lors d’une bonne année (avec disons… 2,5% de croissance !), on gèle les augmentation de salaire de la fonction publique pour 12 mois seulement, on brise le cercle vicieux de l’endettement, et on entre dans le cercle vertueux du remboursement progressif. Car comme chacun sait : mois on s’endette, moins on a d’intérêts à payer, donc plus on rembourse nos dettes !
Voici donc ma conclusion : il est déterminant que lors du prochain cycle de croissance soutenue (qui finira par arriver, c’est dans la nature du système économique !), nos dirigeants aient le courage politique, le grand courage, de serrer la ceinture de l’Etat. C’est au prix de ce sacrifice que nos finances seront assainies – et que nous pourrons mieux réagir aux crises qui viendront ensuite-.
Car n’oublions jamais cela : si nous n’avions pas à payer les intérêts de la dette actuelle, nous n’aurions pas de déficit. Autrement dit, nous sommes en train de nous endetter pour soutenir notre dette.
Ben
* En effet, si l’Etat s’endette de 2% par an avec une croissance économique de 2,2%, le système économique global reste bénéficiaire de 0,2%. Je peux mieux expliquer cet aspect très mathématique des choses si vous m’envoyez un mail à : voixdegrenoble@hotmail.fr. Toutes les questions (et les petits mots !) sont les bienvenus !