Sarkozy sur la défensive

Publié le par Ben

Sarko.jpg Nicolas Sarkozy a annoncé il y a quelques jours ses mesures afin de relancer le pouvoir d'achat. Gesticulant assez souvent, nerveux, cherchant ses mots, le président m'a semblé considérablement plus hésitant que ce à quoi il nous avait habitués.
Mais là n'est sans doute pas le plus important. Ce qui compte, c'est bien sûr les mesures qu'il a annoncées dans cette perspective : entre autres, il a annoncé la possibilité de "monnayer" les RTT (c'est à dire de ne pas les prendre, et en contrepartie de se les faire payer), et la possibilité de travailler le dimanche.
Ces mesures peuvent à première vue paraître plutôt bonnes, en droite ligne du "Travailler plus pour gagner plus".
Toutefois, j'y vois plusieurs limites de taille :

1. Au même titre que la défiscalisation des heures supplémentaires, cette mesure ne résoud pas le problème de sous-emploi en France, puisque selon l'INSEE, près de 1 231 000 de français subissent ce fléau (c'est à dire qu'elles travaillent à temps partiel alors qu'elles voudraient du plein temps, ou alors qu'elles ont fini leur travail en moins de 35 heures et subissent donc un "chômage technique"). Pire, en incitant les employés qui ont du travail à en faire davantage, elle peut conduire les chefs d'entreprise à des licenciements économiques (puisqu'une personne faisant des heures supplémentaires défiscalisées peut produire autant de travail que deux personnes en sous emploi) afin d'augmenter la productivité globale de son personnel, l'effet de "relance de la croissance" n'ayant pas d'effet immédiat à l'échelle de l'entreprise. Ainsi, même si l'économie active serait globalement plus productive, le chômage, lui, augmenterait en compensation (aux effets démographiques près). Au final, on comprend que cette mesure satisfasse la Confédération Générale des Petites et Moyennes entreprises, qui sont le moins susceptibles de licencier du personnel (puisqu'il y a une relation humaine directe entre le "patron" et son employé).

2. Toutefois, il ne faut pas oublier que parmi ces PME, qui représentent tout de même 63% de l'emploi total et 53% de la création de richesse nationale (données gouvernementales), ce sont les secteurs du BTP, du Commerce et de l'Education-Santé qui représentent une forte part de l'emploi : autrement dit, trois secteurs où l'on manque de main d'oeuvre, ce qui pourrait donc éventuellement s'avérer bénéfique pour le pouvoir d'achat des employés. C'est un élément gênant dans le sens où ces secteurs fournissent déjà une main d'oeuvre très bien payée, comparée à l'industrie, par exemple, qui est de nos jours en très grande difficulté.

3. Elle ne règle pas la question des prix immobiliers, qui, même s'ils se tassent, rendent difficile tout espoir d'amélioration de la consommation tant les crédits sont lourds.

4. Elle prend des accents démagogiques à l'heure où la consommation française reste très bonne, et étonne chaque trimestre les analystes étrangers. Il est prouvé depuis longtemps maintenant, que ce dont la France manque, c'est d'investissement. Aussi, pour améliorer le pouvoir d'achat, il aurait surtout été bon de réfléchir à une vraie façon de relancer l'investissement et donc la croissance du pays, ce qui aurait eu des répercussions sur le pouvoir d'achat à long terme, et pas de façon artificielle.

5. Elle coûte 31,5 milliards d'euros, pour des effets sur la croissance et les rentrées fiscales, qui, globalement, restent à prouver.

6. Elle ne règle pas la question majeure des marges de la grande distribution, très importantes, qui étouffent le fournisseur d'un côté, pillent le consommateur de l'autre, et engraissent l'actionnaire au final. Espérons à ce titre que les mesures proposées par la Commission Attali seront bénéfiques, si l'on a encore les moyens de les mettre en oeuvre. Toujours est-il que dans certains secteurs, des abaissements de marges pourraient compenser les hausses récentes des marchés internationaux.


Parce qu'il sent que le vent tourne (il vient de passer sous la barre des 50% de popularité), Nicolas Sarkozy préfère retrouver ses fondamentaux et son "Travailler plus pour gagner plus" pour rassurer les gens. Mais le vrai courage politique, celui dont à l'époque de sa candidature, il n'avait nul besoin, aurait été celui de dire qu'il faut changer la ligne politique du gouvernement... et son cher slogan! Une refonte des finances publiques, un alignement sur la politique européenne, et une réforme complète du marché du travail sont nécessaires.

Ben

Publié dans Economie

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T
travailler plus pour gagner plus, quelle bonne idée...<br /> mais ceci va dépendre des entreprises. je m'explique. certaines entreprises aux 35 heures ne payent les heures supplémentaies qu'au bout de 45 heures de temps de travail par semaine. en d'autres termes, si vous travaillez 47 heures dans votre semaine, vous ne serez payé que 2 heures supplémentaires, les 10 heures restantes seront mises comme RTT. on poura les monayer me direz vous. oui à la condition que le temps de travail par semaine ne soit pas annualisé. ma réflexion se base sur un petit nombre d'entreprises, je pense que certains patrons peu scrupuleux pourront détourner le problème...
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