Espoir

Soldats des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC)

Comme vous le savez tous, deux otages retenus par FARC en Colombie ont été libérés aujourd'hui, suite à l'intervention d'Hugo Chavez. Clara Rojas, l'un d'eux, était directrice de campagne d'Ingrid Betancourt, à l'époque où elle était libre de se présenter.

Ce fut un moment de grande émotion, puisqu'elle a pu retrouver sa mère après six années de captivité, et son fils Emmanuel.

Je ne voudrais en aucun cas jouer les oiseaux de mauvaise augure pour tous ceux que cet évènement touche. Moi qui suis pourtant loin d'être larmoyant, je dois avouer avoir été très touché par l'expression de ces visages, de ces tremblements dans les voix... il y a des fois où l'émotion traverse même les micros. Toutefois, je voudrais - si vous le supportez - apporter mon point de vue.

Tout d'abord, par souci de pédagogie... : D'OU VIENNENT LES FARC?

L'existence des forces rebelles au pouvoir central en Colombie remonte à 1948, à l'époque où le conservateur Laureano Gomez monopolisait le pouvoir. Lorsque finalement, l'armée s'empare manu militari du parti Conservateur en 1953, et éjecte Gomez du pouvoir,  elle déclare l'amnistie générale, sous réserve que les groupes rebelles rendent les armes, au nom de réconciliation nationale.
Toutefois, les groupes marxistes léninistes les plus têtus décident de se maintenir, et fondent une petite République indépendante dans un coin de jungle éloigné de tout le reste du pays : la République de Marquetalia.
En 1958, l'armée rend le pouvoir aux civils. Un gouvernement de coalition est formé, qui néglige quelque peu les rebelles jusqu'en 1964, où, les considérant comme une menace, la droite choisit de lancer  un assaut. Toutefois, la guérilla se disperse, se réorganise... et résiste. Lles FARC d'aujourd'hui en sont les héritiers, et ont conservé cet aspect marxiste-léniniste.

COMMENT PEUVENT-ILS RESISTER A UNE ARMEE REGULIERE, ARMEE ET SOUTENUE PAR LES USA?

Les FARC ont plusieurs sources de revenus. Ils pratiquent par exemple les enlèvements avec rançon, ce qui leur procure une source de revenus non négligeable. On estime à 1600 le nombre d'otages actuels. Les hommes captifs seraient, selon Clara Rojas, dans des conditions de détention inhumaines, contrairement aux femmes.
Les guerilleros pratiquent aussi des assauts sur les routes du pays, afin de voler l'argent et les objets de valeur de leurs victimes qu'ils immobilisent.
 Ils sont en très étroite relation avec les traffiquants d'armes et les réseaux de drogue, qui constituraient leur première source de revenus. Ils cultivent de la coca, avec laquelle ils alimentent les marchés occidentaux en échange d'armes. Le profit annuel de cette activité avoisinnerait les 350 millions de dollars, ce qui est énorme. N'oubliez donc pas qu'à chaque fois que vous vous roulez un joint, vous enfoncez un clou dans le cercueil d'Ingrid Betancourt (avis aux parents désespérés!).
Ils contrôlent aussi une partie du pays qui comprend des mines de cristal et des puits de pétrole. Ils peuvent ainsi faire chanter les quelques propriétaires indépendants du pays, en les menaçant de représailles. Ils peuvent aussi attaquer et des banques, etc... (ils ont en général très peu de considération pour les civils!).

La force des FARC réside dans le fait que même si ses effectifs ne bénéficient en général pas de salaires très stables, leur revenu général approcherait, selon certaines études, 40 fois la moyenne nationale. Les jeunes colombiens rejoignent donc les FARC tant pour des raisons idéologiques que pour des raisons sociales et économiques.

Leurs soldats sont en général aussi bons - voire meilleurs- que les soldats de l'armée Colombienne : ils sont habitués à la jungle, ils la connaissent bien. C'est un terrain propice aux course-poursuites, aux attaques éclairs, aux fuites rapides.

Y A-T-IL UN ESPOIR POUR I. BETANCOURT?

J'avoue être sceptique. L'ex-mari d'Ingrid parle d'"Espoir", et j'adhère à cette position, mais je ne crois en rien de plus. Il n'y a gère plus de chances qu'auparavant qu'Ingrid soit libérée. Tout au plus, pouvons-nous espérer que d'autres otages, "moins importants", soient ôtés de leur emprise.
Je pars en effet du principe que les FARC ont besoin d'attirer l'attention de l'opinion mondiale afin de tirer au mieux parti de la situation. La médiatisation leur donne un poids certain, et donne la sensation d'accroître les enjeux. Il n'y a qu'à voir la concurrence Uribe-Chavez : elle a clairement avantagé les FARC, qui ont arbitré entre les deux. Et qui permet aux FARC d'avoir un tel poids, d'être si médiatisés? Ingrid Betancourt. Là est donc le noeud du problème : soit mon analyse est fausse, et dans ce cas, tout redevient possible, avec le risque qu'Ingrid meure avant qu'on parvienne à la libérer (compte-tenu de son état de santé). Son fils parle d'ailleurs de "course contre la mort". Soit mon hypothèse est bonne, et il se peut alors qu'Ingrid ne soit jamais libérée tant que les FARC séviront, ou pire, soit tuée par ceux-ci en représailles de lourdes pertes.

Je prie pour avoir tort.

Ben

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